Il a suffi de faire un voyage en train inconfortable pour convaincre l’ingénieur George Pullman de créer le célèbre wagon-lit Pullman.
Qui était George Pullman ?
Pullman est né en 1831 dans l’état de New York d’un père qui avait inventé une machine utilisant des vérins pour soulever et déplacer des bâtiments. À la mort de son père en 1855, George a repris l’entreprise de son père, et en 1856, il a remporté un contrat pour déplacer 20 bâtiments hors du chemin du canal Érié en expansion.
En 1857, Pullman arrive à Chicago pour aider à surélever les bâtiments de cette ville qui, située près du lac Michigan, était fréquemment inondée. Chicago avait besoin de soulever ses rues de 6 à 8 pieds (1,82-2,43 mt), et de soulever ses bâtiments de 4 et 6 pieds (1,21-1,82 mt).
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La méthode de Pullman pour soulever les bâtiments était si efficace que ses ouvriers étaient capables de soulever la Tremont House, un hôtel en briques de six étages, alors que ses clients restaient dans leurs chambres.
En 1862, après une nuit inconfortable à bord d’un train, Pullman eut l’idée de créer un wagon-lit de luxe qu’il surnomma, « The Pioneer ». Dans une remarquable démonstration de prescience, Pullman a commercialisé ses wagons comme « le luxe pour la classe moyenne ».
La seule mouche du coche était que la grande taille de The Pioneer signifiait qu’il ne s’adapterait pas aux plateformes de train existantes. Pullman a résolu ce problème à l’aide d’un événement extrêmement malheureux – l’assassinat du président Abraham Lincoln en 1865.
Le corps de Lincoln a été transporté par train de Washington, D.C. à sa ville natale de Springfield, Illinois, et Pullman s’est arrangé pour que plusieurs de ses nouveaux wagons soient inclus dans le train funéraire. Cela signifiait que chaque gare et pont entre les deux villes devait être modifié pour accueillir le nouveau wagon de Pullman.
La publicité générée par le dernier voyage en train de Lincoln a transformé le wagon-lit Pullman en un succès fulgurant. En 1867, George Pullman avait 50 wagons en circulation sur trois chemins de fer différents.
En 1867, Pullman devient président de la nouvelle Pullman Palace Car Company. En 1879, la société avait 464 wagons disponibles à la location, un revenu annuel brut de 2,2 millions de dollars et un bénéfice annuel net de près d’un million de dollars. Outre les wagons, la société fabriquait et vendait également des wagons de marchandises, des wagons frigorifiques, des tramways et des wagons de train surélevé.
Le « Pioneer »
Le nouveau wagon de Pullman avait des ressorts caoutchoutés qui réduisaient les secousses, ses parois étaient revêtues de noyer foncé et ses sièges étaient recouverts de velours pelucheux. Des stores de fenêtre en soie, des lustres en cristal et des luminaires en laiton ajoutaient à l’impression générale de luxe.
Mais, c’est la nuit que le Pioneer brillait vraiment. Les sièges de la voiture se dépliaient en couchettes inférieures, et les couchettes supérieures se déployaient depuis le plafond. Afin d’accomplir cette transformation, Pullman a embauché des hommes afro-américains nouvellement libérés après la guerre civile, et ils sont devenus connus sous le nom de Pullman Porters.
Connus pour leurs vestes blanches amidonnées, en plus de transformer les wagons en wagons-lits, les Pullman Porters servaient également de serveurs, de valets et même d’animateurs. Au début des années 1900, Pullman est devenu le plus grand employeur d’Afro-Américains dans l’Amérique de l’après-guerre civile.
Les porteurs Pullman ont travaillé dans les trains américains jusqu’à ce que la Pullman Company cesse ses activités le 31 décembre 1968. Certains anciens porteurs Pullman ont continué à travailler sur les trains Amtrak après la création de cette société en 1971.
En 1925, sous la direction d’A. Philip Randolph, les porteurs Pullman ont formé le premier syndicat entièrement noir appelé Brotherhood of Sleeping Car Porters. Ce syndicat a joué un rôle déterminant dans la formation du mouvement américain des droits civiques.
La rémunération des porteurs de Pullman était faible, et la plupart des porteurs comptaient sur les pourboires des passagers pour joindre les deux bouts. Cependant, le travail avait d’autres avantages, il offrait des voyages illimités, et les porteurs Pullman ont développé une réputation de service qui leur a permis d’accéder à des emplois dans des hôtels et des restaurants de qualité, et même à la Maison Blanche.
Le wagon-restaurant et le vestibule couvert
Puis, George Pullman a créé deux innovations qui ont révolutionné le voyage en train : le wagon-restaurant et le vestibule couvert entre les wagons. Le wagon-restaurant permettait de préparer et de servir de la nourriture pendant les longs voyages en train, et le vestibule couvert permettait aux passagers de se déplacer librement et en toute sécurité entre les wagons.
Avant l’invention du vestibule de train, les passagers devaient enjamber une plaque de décalage entre les wagons, avec seulement un garde-fou auquel s’accrocher. Ils étaient également exposés aux intempéries et aux cendres provenant de la locomotive.
Pullman, la ville de la compagnie
En 1880, Pullman a commencé à construire une usine et une ville de compagnie adjacente située à 14 miles (23 km) au sud de la ville de Chicago. La ville, appelée Pullman, comprenait des maisons, des magasins, une église, des théâtres, des parcs, un hôtel et une bibliothèque pour les travailleurs de l’usine Pullman.
La ville de Pullman était une attraction de premier plan pour les visiteurs qui assistaient à l’Exposition colombienne mondiale de 1893 à Chicago, cependant, tout n’était pas aussi brillant qu’il y paraissait. George Pullman dirigeait la ville comme un baron féodal. Il interdit les journaux indépendants, les discours publics, les réunions publiques et les discussions ouvertes. Les inspecteurs de Pullman étaient même autorisés à entrer dans les maisons pour inspecter la propreté.
En 1894, un ralentissement économique a fait chuter la demande de nouveaux wagons. En réponse, Pullman a réduit les emplois et les salaires et augmenté les heures de travail dans son usine. Dans le même temps, il n’a pas baissé les loyers ou les prix des biens vendus à Pullman, ce qui a conduit ses ouvriers à se mettre en grève.
La grève s’est rapidement étendue aux autres chemins de fer, et en quelques jours, plus de 125 000 cheminots étaient en grève, et le trafic ferroviaire sur toutes les lignes à l’ouest de Chicago s’était arrêté. Le président Grover Cleveland a envoyé des troupes pour réprimer la grève et des émeutes ont éclaté. Le 7 juillet 1894, des gardes nationaux ont tiré sur une foule, tuant environ 34 personnes. En 1898, une commission présidentielle a commencé à enquêter sur l’incident, et la Cour suprême de l’Illinois a obligé Pullman à céder sa propriété de la ville. Pullman fut annexé à la ville de Chicago.
L’héritage de Pullman
Dans les années qui suivirent la grève, l’entreprise de Pullman construisit des wagons pour le système de trains surélevés de la ville de New York, et elle continua à fabriquer des wagons jusqu’en 1982. George Pullman est mort en 1897 à l’âge de 66 ans, et il est enterré au cimetière Graceland de Chicago. Son cercueil repose sous plusieurs tonnes de béton, tant Pullman craignait que son corps ne soit profané par des militants ouvriers.
Dans son testament, Pullman lègue 1,2 million de dollars pour créer la Pullman Free School of Manual Training pour les enfants des employés de la Pullman Palace Car Company, et pour les habitants du quartier voisin de Roseland.
Aujourd’hui, la George M. Pullman Educational Foundation fournit de l’argent aux lycéens en fin d’études avec des bourses d’études basées sur le mérite et les besoins pour fréquenter l’université de leur choix. À ce jour, la Fondation a accordé 30 millions de dollars à plus de 13 000 étudiants exceptionnels du comté de Cook.
Dans l’État de Washington, la ville de Pullman porte le nom de George Pullman, car la ville s’attendait à ce qu’il y construise un chemin de fer. Au lieu de cela, Pullman a construit la route vers la ville de Spokane, dans l’État de Washington.
En outre, en 1963, Mercedes-Benz a sorti sa ligne 600 qui comprenait un modèle à empattement long appelé « Pullman ». Les versions allongées des voitures Mercedes-Benz Classe S étaient également appelées « Pullman ».