2.1 Accords et conventions internationaux en matière d’environnement
Introduction
Les problèmes environnementaux ne respectent pas les frontières nationales, mais il n’en reste pas moins que les principaux acteurs au niveau international sont les Etats-nations. Traditionnellement, le seul moyen disponible pour réglementer le comportement des États-nations est un système de droit international, codifié dans des traités et des conventions. Depuis le début du siècle, plus de 170 traités et instruments multilatéraux sur l’environnement ont été établis, couvrant des sujets allant de l’atmosphère et de l’environnement marin à la conservation de la nature et aux cours d’eau transfrontaliers. La grande majorité de ces accords ont une portée régionale, et nombre d’entre eux ne s’appliquent qu’à l’Europe. Une liste des conventions et accords internationaux pertinents figure à l’annexe 1.
Les organisations et agences internationales contribuent à l’élaboration d’un grand nombre de ces accords. Les principaux acteurs sont énumérés dans l’encadré 1. Il s’agit d’organisations mondiales ayant une dimension paneuropéenne (par exemple, la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe – CEE-ONU) ; d’organisations à prédominance économique dont les membres comprennent l’Europe occidentale mais s’étendent au-delà (par exemple, l’OCDE) ; d’organisations qui étaient à l’origine exclusivement ouest-européennes mais qui commencent maintenant à inclure les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) (par exemple, le Conseil de l’Europe) ; et d’un réseau d’organisations et d’agences distinctes qui se sont récemment réunies sous l’égide paneuropéenne du processus « Un environnement pour l’Europe » (voir section 3.4).
Boîte 1 : Institutions internationales ayant un rôle environnemental
Institutions des Nations unies | ||
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PNUE | Programme des Nations unies pour l’environnement | |
Commission économique des Nations unies pour l’Europe | Commission économique des Nations unies pour l’Europe | |
UNESCO | Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, scientifique et culturelle | |
PNUD | Programme des Nations Unies pour le développement | |
OMS | Organisation mondiale de la santé | |
FAO | Organisation pour l’alimentation et l’agriculture | . Agriculture |
OMM | Organisation Météorologique Mondiale | |
OMI | Organisation Maritime Internationale | |
Institutions plus larges que l’Europe ayant un rôle environnemental | ||
. Europe ayant un rôle environnemental | ||
OECD | Organisation de coopération et de développement économiques | |
GATT | Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce | |
CSCE | Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe | |
Institutions européennes | ||
CE | Communauté européenne | |
EFTA | Association européenne de libre-échange | . libre-échange |
Conseil de l’Europe | ||
Institutions financières | ||
Banque mondiale | ||
BERD | Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BEAD) Banque européenne pour la reconstruction et le développement | |
BEI | Banque européenne d’investissement | |
Organisations régionales | ||
OSPAR | Commission d’Ostende et de Paris | |
Commission du Rhin | ||
Commission du Danube | ||
Commission d’Helsinki | ||
Union économique du Benelux |
L’efficacité des organisations et des accords internationaux en matière d’environnement
Plusieurs des organisations énumérées dans l’encadré I ont apporté des contributions significatives à la coopération environnementale en Europe.l’environnement en Europe. Par exemple, la Coopération économique pour l’Europe des Nations unies (CEE-ONU), qui réunit en un seul forum les 55 pays d’Europe occidentale et orientale, a élaboré neuf instruments juridiques régionaux visant à protéger l’environnement. Ceux-ci couvrent la pollution de l’air et de l’eau – y compris la Convention de 1979 sur la pollution atmosphérique transfrontalière à longue distance (CLRTAP – voir encadré 2), les accidents industriels et l’évaluation de l’impact sur l’environnement. En outre, la CEE-ONU a joué un rôle clé dans le développement de la coopération environnementale paneuropéenne dans le cadre du processus « Environnement pour l’Europe » (voir section 3.4).
Box 2 : La Convention sur la pollution atmosphérique transfrontalière à longue distance
La Convention de 1979 sur la pollution atmosphérique transfrontalière à longue distance et ses protocoles – couvrant les émissions de soufre (1985 et 1994), d’oxydes d’azote (1988) et de composés organiques volatils (1991), et sur le partage international des coûts de surveillance des polluants atmosphériques (EMEP, 1984) – fournissent ensemble un cadre européen de contrôle de la pollution atmosphérique comprenant des activités législatives, consultatives, de recherche et de surveillance. En 1993, les 21 parties au protocole d’Helsinki de 1985 avaient réduit leurs émissions de soufre de 43 % par rapport à 1980, dépassant ainsi largement la réduction de 30 % à laquelle elles s’étaient engagées. Sur les 25 parties au protocole de Sofia de 1988 sur le contrôle des émissions de NOx, dix-sept ont réussi à stabiliser les émissions de N0x aux niveaux de 1987, et cinq d’entre elles ont réduit leurs émissions de plus de 25 %. Avec la signature d’un nouveau protocole sur le soufre en 1994, un comité de mise en œuvre a été créé pour renforcer le contrôle du respect de leurs obligations par les signataires.
Malgré ces réalisations, l’efficacité de bon nombre de ces organisations a été limitée par un ou plusieurs des facteurs suivants:
- l’environnement ne représente qu’une petite partie de leurs activités globales;
- à l’exception du processus « Un environnement pour l’Europe », leur travail se limite à des actions spécifiques sur un petit nombre de questions;
- ils ont recours à des instruments moins contraignants qui peuvent ne pas s’attaquer efficacement aux véritables problèmes.
Les exemples d’accords internationaux les plus efficaces comprennent la Convention de Vienne sur la protection de la couche d’ozone et la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontalière à longue distance (voir encadrés 2 et 3). Mais le succès des autres accords a été mitigé.
Cadre 3 : La Convention de Vienne pour la protection de la couche d’ozone
Les négociations de la convention ont commencé en 1981, suite à l’accumulation de preuves scientifiques sur la destruction de la couche d’ozone. La convention a été signée et ratifiée par plus de 130 nations et est entrée en vigueur en 1988. Les objectifs de la convention comprennent la protection de la santé humaine par la coopération dans la recherche scientifique, l’échange d’informations et l’adoption de mesures visant à réduire les effets néfastes sur la couche d’ozone. Il s’agit d’une convention-cadre, qui laisse à des protocoles ultérieurs le soin de définir des mesures plus spécifiques pour protéger la couche d’ozone. Le protocole de Montréal (1987) a établi des rapports de surveillance obligatoires et a introduit des sanctions commerciales et des dispositions pour le règlement des différends. L’amendement de Londres (1990) a ajouté de nouvelles dispositions concernant les transferts de technologie et les mécanismes financiers, notamment un fonds multilatéral destiné à couvrir les coûts de mise en conformité. L’amendement de Copenhague (1992) accélère les dates d’élimination des produits chimiques et rend les dispositions financières plus fermes.
Un problème clé de tous les accords internationaux sur l’environnement est que leur succès dépend en fin de compte de la volonté des États-nations « souverains » de les accepter et de les appliquer correctement. Le sentiment croissant d’urgence à s’attaquer à des problèmes de plus en plus complexes a conduit à une évolution en faveur de conventions plus « souples » qui peuvent être rédigées et signées dans un délai relativement court. Il peut s’agir de codes de pratique, de lignes directrices ou de cadres qui laissent une grande marge de manœuvre dans l’interprétation de leurs exigences précises. Il peut être plus facile de se mettre d’accord, mais leur flexibilité même peut réduire leur efficacité.
Les autres facteurs limitant le succès des conventions comprennent :
- la portée de l’instrument lui-même et la mesure dans laquelle il traite adéquatement la question ;
- le nombre limité de parties à un accord ;
- l’efficacité du suivi et de l’application.
La portée des accords
Une action internationale efficace repose sur la disponibilité de données complètes et fiables permettant d’identifier des problèmes particuliers, d’établir leurs causes et de révéler les lacunes et les échecs des politiques et des actions existantes. C’est, par exemple, l’observation scientifique qui a révélé pour la première fois le trou dans la couche d’ozone au-dessus de l’Antarctique. La mise en place de systèmes fiables de collecte de données est un début, mais il reste encore beaucoup à faire.
Le plus petit dénominateur commun – les objectifs sont-ils assez exigeants ?
Les conventions reposent sur une convergence d’intérêts entre des États-nations souverains. En conséquence, les accords reflètent souvent les ambitions et les objectifs du « plus petit dénominateur commun ». Plus le nombre de parties à une convention augmente, plus la portée et l’efficacité précises de l’accord sont réduites. La Convention sur les changements climatiques de 1992 n’en est qu’un exemple (voir encadré 4).
Boîte 4 : La Convention sur les changements climatiques
Le principal objectif de la Convention, qui a été ouverte à la signature lors de la CNUED en 1992 et qui a été signée par plus de 130 parties, est la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre afin de limiter les interférences avec le système climatique, Les émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre devraient revenir aux niveaux de 1990 d’ici l’an 2000 – bien que cet objectif ne soit pas contraignant. Les récentes conclusions du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) suggèrent que cet objectif est tout à fait inadéquat et que les émissions de gaz à effet de serre doivent en fait être réduites de 60% pour stabiliser les concentrations atmosphériques.
Le nombre de signataires
Un avantage des conventions et accords internationaux est leur champ d’application potentiellement large. Dans la pratique, cependant, ce champ peut être limité pour plusieurs raisons, notamment
- les coûts de participation pour les pays individuels;
- la disponibilité limitée du savoir-faire technique.
En particulier parmi les pays d’Europe centrale et orientale, de graves pénuries de ressources ont eu un impact majeur sur leur capacité à participer aux conventions environnementales
Le concept de « partage de la charge » comme moyen de répartir les coûts souvent lourds de la réduction de la pollution a gagné du terrain récemment, en particulier en ce qui concerne la Convention sur la pollution atmosphérique transfrontière à longue distance (CLRTAP). Au cours des négociations menant au protocole d’Oslo de 1994 sur de nouvelles réductions du SO2, la création d’un fonds pour l’acidification a été examinée. Dans le cadre du fonds proposé, les pays en transition recevraient de l’argent en fonction de leur PIB et de leurs coûts de réduction, les nations plus riches contribuant sur une base similaire.
En outre, les pays en transition ont besoin d’une assistance technique améliorée si l’on veut respecter les normes internationales.
Cette assistance peut être fournie par des centres d’échange, des services d’orientation, des programmes d’échange ou des banques de droits technologiques.
Surveillance et application
L’aspect le plus faible des conventions internationales en matière d’environnement réside peut-être dans leur mise en œuvre et leur application.Les parties aux accords internationaux trouvent généralement que les systèmes de surveillance et d’application externes sont inacceptables, et souhaitent contrôler elles-mêmes la surveillance. Les informations recueillies de cette manière peuvent être incomplètes ou inexactes en raison des différences de méthodes et de normes de surveillance.
Un certain progrès a été réalisé avec la mise en place du programme d’examen des performances environnementales de l’OCDE, dont l’objectif principal est d’aider les pays à améliorer leurs performances par le biais d’un examen par les pairs. Pour les pays européens non membres de l’OCDE, des programmes d’examen environnemental similaires doivent être mis en œuvre dans le cadre de la CEE-ONU. Mais les examens des performances environnementales prennent du temps et dépendent de la volonté des pays de participer.
La CEE-ONU contrôle actuellement le respect de chacun de ses instruments et présentera ses conclusions à leurs signataires ou parties. Le protocole de la CPATLD de 1994 sur une nouvelle réduction des émissions de soufre prévoit la création d’un comité d’application officiel chargé de suivre en permanence la question de la conformité.
Si la surveillance révèle qu’une partie ne respecte pas les obligations d’une convention internationale, il n’y a cependant pas grand-chose à faire en l’absence de mécanismes d’application efficaces. En fin de compte, c’est peut-être l’opinion publique seule qui peut exercer une pression sur les États pour qu’ils répondent plus vigoureusement aux défis environnementaux, qu’ils participent aux conventions et qu’ils respectent leurs obligations environnementales. Mais le public a besoin d’un accès beaucoup plus large à l’information sur les conventions et accords internationaux et leur efficacité, un domaine où, traditionnellement, la participation du public et du parlement a été minimale.
2.2 Politique environnementale de l’UE – réalisations et limites
Introduction
L’un des principaux atouts de l’Union européenne est que – contrairement à d’autres organisations internationales – elle est un organe législatif. Lorsqu’elle agit en tant que législateur, ses directives, règlements et décisions sont contraignants pour les États membres et peuvent être appliqués par la Cour de justice de l’UE.
Cette approche législative – ou « commande et contrôle » – a constitué la base de la politique environnementale de l’UE au cours des 20 dernières années. Il existe maintenant plus de 300 directives et règlements conçus pour répondre à un large éventail de problèmes, y compris un grand nombre (mais pas tous) des douze problèmes prioritaires énumérés dans L’environnement en Europe.(1)
La législation européenne couvre
- l’eau, la pollution de l’air et du bruit
- la gestion des déchets
- les substances nocives
- la radioactivité
- la protection de la vie sauvage et des paysages
- les questions globales
- l’évaluation environnementale et l’accès à l’information
Le développement rapide de la politique environnementale de l’UE est indiqué par la figure 1.
Figure 1 : Législation environnementale de l’UEadoptée chaque année
L’influence de la législation environnementale de la Communauté s’étend bien au-delà des frontières de ses douze Etats membres actuels. Avant même que certains d’entre eux ne deviennent membres à part entière de l’UE, les sept pays de l’Association européenne de libre-échange (AELE) appliquent les principales caractéristiques de la politique environnementale de l’UE, suite à la création de l’Espace économique européen (EEE) en 1993. L’EEE étend le marché unique de l’UE et les politiques associées à 19 pays au total, de l’Arctique à la Méditerranée.
En attendant, en Europe centrale et orientale (PECO),les accords d’association avec la Pologne, la Hongrie, la République tchèque, la Slovaquie, la Bulgarie et la Roumanie exigent une certaine évolution vers les normes environnementales de l’UE. L’adhésion éventuelle des PECO à l’UE nécessitera l’application intégrale de la législation communautaire en matière d’environnement (bien que, dans certains cas, avec de longues périodes de transition). Un soutien financier substantiel pour un certain nombre de projets et de programmes environnementaux dans la région est déjà disponible par le biais du programme PHARE de l’UE.
Depuis 1973, la législation environnementale de l’UE s’est développée dans un cadre défini par une série de programmes d’action environnementale. Ceux-ci définissent périodiquement la manière dont l’UE propose de développer sa politique et sa législation environnementales au cours des quatre années suivantes ou plus. Le cinquième programme de ce type, intitulé « Vers un développement soutenable : Le cinquième programme de ce type, intitulé « Vers un développement soutenable : Programme communautaire de politique et d’action en matière d’environnement et de développement durable », a été publié en 1992(2). Il définit une nouvelle approche pour relever les défis environnementaux auxquels l’Europe sera confrontée d’ici à l’an 2000 et est décrit plus en détail dans la section 3.3 ci-dessous.
Le point de départ du cinquième programme est que l’approche traditionnelle de l’UE en matière de protection de l’environnement a ses limites. Il n’entre pas dans le cadre de ce document de tenter une évaluation complète de la politique environnementale de l’UE, mais certaines conclusions préliminaires peuvent être tirées. Quelques-unes des réussites les plus notables de l’UE sont énumérées dans l’encadré 5.
Encadré 5 : Réalisations de la législation environnementale de l’UE
- l’introduction d’un système d’évaluation de tous les nouveaux produits chimiques avant leur mise sur le marché ; le relèvement des normes dans toute la Communauté pour les eaux de baignade et l’eau potable grâce à l’application des directives 76/160 et 80/778 ;
- amélioration de la qualité de l’air local par la réduction, dans de nombreuses régions, de la pollution par les fumées et le dioxyde de soufre (directive 80/779)
- réduction des émissions d’échappement nocives telles que le plomb, les oxydes d’azote, les hydrocarbures et le monoxyde de carbone provenant des véhicules individuels ;
- l’introduction dans la directive « Seveso » 82/501 de mesures visant à prévenir les accidents industriels majeurs et à limiter les effets de ceux qui se produisent;
- l’introduction à l’échelle communautaire d’un système d’évaluation des incidences sur l’environnement pour les grands projets de développement ayant des effets importants sur l’environnement.
Limites de la politique environnementale actuelle de l’UE
Malgré ces réalisations, la Commission elle-même a reconnu les faiblesses de la politique environnementale de l’UE et prend des mesures pour améliorer les choses.
Au cours des vingt dernières années, la législation de l’UE s’est développée de manière ad hoc en fonction d’un agenda politique changeant.Les directives individuelles reflètent parfois un manque de données scientifiques adéquates et/ou des compromis politiques insatisfaisants. En conséquence
- il y a des lacunes importantes dans la couverture;
- la législation fixe parfois des objectifs insuffisants;
- la législation se concentre sur les médias environnementaux individuels plutôt que sur l’environnement dans son ensemble.
En outre, l’impact de nombreux éléments de la législation est gravement affaibli par une mise en œuvre et une application inadéquates.
Les lacunes dans la couverture
- La Communauté n’a pas été en mesure jusqu’à présent de développer une réponse satisfaisante de l’UE au problème du changement climatique mondial. Alors que l’UE dans son ensemble s’est engagée à réduire les émissions de dioxyde de carbone aux niveaux de 1990 d’ici l’an 2000, aucune stratégie claire pour y parvenir n’a encore été adoptée au niveau communautaire. Les informations dont dispose la Commission sur les programmes actuels des États membres en matière d’émissions et de réduction du CO2 sont limitées, malgré les exigences de la directive 93/389 établissant un mécanisme de surveillance du CO2. Néanmoins, elles indiquent que l’engagement de stabilisation ne peut être respecté sans de nouvelles réductions au-delà de celles prévues. Entre-temps, les propositions de la Commission concernant une taxe sur le carbone et l’énergie sont bloquées au Conseil, et une approche communautaire visant à limiter les émissions d’un autre gaz à effet de serre important – le méthane – doit encore être élaborée.
- Le problème de la mauvaise qualité de l’air urbain n’a été abordé que dans un premier temps. Les directives fixant des normes de qualité de l’air pour le plomb, la fumée, le dioxyde de soufre et le dioxyde d’azote constituent une première étape importante (bien que leur efficacité ait été limitée par une surveillance inadéquate et des méthodes de mesure incohérentes). Des mesures sont nécessaires pour s’attaquer à un large éventail d’autres polluants ayant des effets graves sur la santé, tels que les particules, le benzène et les hydrocarbures polyaromatiques. Un projet de directive-cadre sur la qualité de l’air propose de nouvelles mesures pour ces substances et d’autres, mais il doit encore faire l’objet d’un accord.
- Des valeurs limites d’émission et des normes de qualité pour les substances dangereuses dans l’eau n’ont été fixées que pour un petit nombre de substances dans des directives « filles » élaborées dans le cadre de la directive 76/464. La Commission a établi une liste prioritaire de 129 de ces produits chimiques, mais la législation communautaire en vigueur ne couvre que 17 d’entre eux.
- Les autres lacunes notables sont l’absence d’une approche globale de la lutte contre le grave problème de la dégradation des sols, tant en ce qui concerne l’érosion que la contamination. Jusqu’à présent, il n’existe pas non plus d’obligation pour les États membres et l’industrie d’établir un registre des émissions polluantes, contenant une liste de tous les polluants émis dans l’environnement par les installations industrielles dans le cadre de leurs activités.
Les objectifs limités de certaines législations européennes
En plus de ces lacunes dans la couverture, de nombreux éléments de la législation européenne ne vont pas assez loin pour être correctement efficaces.
- La principale réponse de l’UE au problème de l’acidification est la directive 88/609 de 1989 limitant les émissions de SO2 et de NOx des grandes installations de combustion. En plus de fixer des normes d’émission pour les nouvelles installations, la directive exige également que les États membres réduisent progressivement les émissions des installations existantes dans des proportions variables, de sorte que les émissions globales de SO2 de l’UE devraient être réduites de 58 % d’ici 2003. Des recherches récentes sur les « charges critiques » – le niveau de pollution que des écosystèmes particuliers peuvent tolérer sans subir de dommages supplémentaires – indiquent que les objectifs de la directive sont trop bas pour empêcher que les forêts, les lacs et les rivières d’Europe ne continuent à subir des dommages. De plus, les réductions d’émissions exigées de certains États membres ne reflètent pas leurs contributions relatives aux dommages dus à l’acidification.
- Environ 70 % de l’eau potable de la Communauté provient de sources souterraines, mais comme l’indique L’environnement en Europe, les eaux souterraines continuent à subir une contamination qui, dans la plupart des cas, est irréversible. La directive 80/68 de l’UE sur la protection des eaux souterraines contre certaines substances dangereuses n’a pas réussi à inverser cette tendance. Ses exigences en matière de contrôle des rejets – en particulier ceux provenant de sources diffuses – et de forme de surveillance et de rapport ne sont pas suffisamment solides pour empêcher de nouveaux dommages.
Approche à milieu unique
La législation environnementale de l’UE a généralement cherché à contrôler les émissions dans des milieux individuels – air, eau et (dans une bien moindre mesure) sol – ou à en protéger la qualité. Cette approche « à milieu unique » ne tient pas compte du fait que l’environnement doit être considéré comme un tout : les contrôles des émissions dans un milieu peuvent souvent entraîner un déplacement de la pollution vers un autre. Par exemple, la réduction des émissions acides des cheminées des grandes installations de combustion par l’installation d’un équipement de désulfuration des gaz de combustion (DGC) peut entraîner une augmentation de la pollution de l’eau ou du sol. La lutte intégrée contre la pollution (IPC), en revanche, vise à réduire la pollution de l’environnement dans son ensemble. La proposition de législation européenne exigeant des États membres qu’ils introduisent un système de prévention et de réduction intégrées de la pollution (IPPC) doit encore être approuvée par les États membres.
Échecs de la mise en œuvre et de l’application
Une condition préalable essentielle à l’efficacité est que la législation soit correctement mise en œuvre et appliquée sur le terrain.
L’échec de la mise en œuvre des exigences des directives environnementales de l’UE est désormais un problème grave. En 1993, le nombre de suspicions d’infractions aux directives sur l’environnement – près de 400 – venait en deuxième position après celles relatives au marché intérieur.(3)
Les principaux éléments de la législation qui n’ont pas été correctement mis en oeuvre comprennent la directive 79/409 sur la conservation des oiseaux sauvages, la directive 85/337 sur l’évaluation des incidences sur l’environnement, et plusieurs directives sur l’eau et les déchets.
Une première étape essentielle pour renforcer la mise en oeuvre est d’améliorer la disponibilité des informations sur les développements dans chaque État membre. Le seul État membre pour lequel un examen indépendant, régulier et complet de la manière dont tous les éléments de la législation environnementale de l’UE sont mis en œuvre, et de leur impact sur la pratique, est le Royaume-Uni.(4)
De nombreuses directives environnementales comportent des exigences variables selon lesquelles les gouvernements doivent faire régulièrement rapport à la Commission sur la manière dont ils mettent en œuvre la législation. Cependant, ces rapports peuvent n’être rédigés que rarement, de manière incomplète ou pas du tout. En conséquence, des informations essentielles pour évaluer l’efficacité de la législation européenne sont refusées tant à la Commission qu’au grand public. La directive 91/692 relative à l’établissement de rapports normalisés vise à renforcer les obligations des États membres en matière de rapports, mais il reste à voir dans quelle mesure elle sera efficace.
En l’absence de ces informations de base, la Commission a été obligée de s’appuyer sur les plaintes d’autres États membres, de députés européens, d’entreprises, d’ONG ou de particuliers pour prendre des mesures d’application.
Selon les termes de son règlement institutif. Que l’Agence se voie ou non confier un rôle formel dans le contrôle et l’application de la législation communautaire, il semblerait essentiel qu’elle entreprenne des examens comparatifs de la mise en œuvre des politiques afin de fournir des informations et des orientations à la Commission et aux États membres sur l’efficacité des différentes mesures et approches politiques.
Dans le cadre de sa création, le règlement 1210/90, la question de savoir si l’Agence européenne pour l’environnement devrait jouer un rôle dans le contrôle de la mise en œuvre des mesures communautaires dans les États membres a été reportée pour décision jusqu’à l’achèvement d’un examen des deux premières années de fonctionnement de l’Agence.