Center for International Maritime Security

La torpille : facilitateur d’une attaque asymétrique….

L’asymétrie est un mot très populaire de nos jours et, à mon avis, un mot appliqué trop fréquemment à trop de choses. Le professeur Robert Farley fait remarquer que les attentes asymétriques sont à la base des décisions concernant toutes les batailles. « Les combattants s’engagent parce qu’ils ont des attentes différentes quant aux résultats probables », explique-t-il. Mais toutes les recherches pour obtenir un avantage dans une bataille ne sont pas asymétriques. L’utilisation de tous les moyens et conditions disponibles pour déséquilibrer un adversaire est au cœur de la stratégie indirecte de Liddell Hart. Alors peut-être que revenir à la symétrie et se concentrer conceptuellement sur la guerre symétrique permettrait de faciliter la compréhension de problèmes complexes liés aux rôles et à la conception des navires.

L’asymétrie est une stratégie du faible contre le fort. Un côté n’a pas la possibilité d’affronter son adversaire coup pour coup, et utilise plutôt un type d’attaque pour lequel l’adversaire plus fort a développé des défenses inefficaces. Il s’agit plus d’un cadre conceptuel que de quelque chose lié à une arme particulière, et en fait la même arme peut être à la fois une attaque asymétrique ou symétrique selon son utilisation. Des torpilles lancées par un destroyer contre un cuirassé constituent une guerre asymétrique, mais lancées contre un autre destroyer filtrant ce cuirassé, elles deviennent symétriques. La doctrine et les capacités anti-accès de la marine de l’APL sont asymétriques par rapport à la marine américaine, mais les mêmes capacités liées à un concept plus mahanien seraient symétriques par rapport aux forces JMSD, ou écrasantes par rapport à la marine vietnamienne. Dans le dernier cas, nous assisterions à une inversion des rôles.

L’asymétrie est également un phénomène transitoire. L’utilisation des torpilleurs était considérée par la Jeune Ecole comme une stratégie asymétrique visant la Royal Navy britannique et son commerce, mais très vite les Britanniques ont su maîtriser cette menace et rétablir la symétrie en créant le destroyer. La même torpille, soutenue par un excellent entraînement, faisait partie d’une stratégie asymétrique de la marine impériale japonaise dans les actions de nuit contre l’homologue américain (localement) numériquement supérieur. Le radar a rapidement annulé ce concept, bien que, comme l’a noté le capitaine Wayne Hughes dans son ouvrage Fleet Tactics and Coastal Combat, la marine américaine ait mis du temps à saisir le concept d’utilisation du radar, malgré le fait qu’il était déjà techniquement en service lors de la bataille de l’île Savo.

…et des surprises en yaourt glacé!

L’avantage de revenir conceptuellement à la symétrie comme principe directeur se voit dans la façon dont les navires de guerre étaient construits et conçus dans le passé. Un cuirassé était censé porter des armes offensives capables de détruire la flotte de combat d’un ennemi. Dans le même temps, un blindage devait lui assurer une protection contre des adversaires similaires (symétriques). Dans le cas des croiseurs, la situation était différente, principalement en raison des limitations imposées par le traité de Washington, mais les derniers croiseurs conçus sans de telles limitations sont revenus à la nécessité de combattre des adversaires de la même classe. Pour les navires modernes, il serait beaucoup plus facile de penser en termes de mission primaire, tout en prenant comme règle la capacité de combattre un adversaire de classe similaire.

En regardant un exemple contemporain, la mission primaire de l’ensemble de missions de guerre de surface du LCS est de contrer les menaces asymétriques, comme l’attaque en essaim, mais il manque de capacités pour contrer un adversaire symétrique comme une corvette à missiles. Mon analyse peut être considérée comme une simplification excessive, mais elle peut néanmoins contribuer à encadrer une partie de ce qui devrait être un discours rationnel entre des personnes qui n’ont aucune chance de s’attaquer aux CONOPS du monde réel. J’aime la façon dont le premier maître Brett F. Ayer explique les besoins en matière de coupeurs de patrouille hauturiers.

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