Prise de décision chez les patients âgés atteints de sténose aortique sévère : pourquoi tant d’entre eux se voient refuser une intervention chirurgicale ?

Abstract

Abjectifs Analyser la prise de décision chez les patients âgés atteints de sténose aortique (SA) sévère et symptomatique.

Conclusion La chirurgie a été refusée chez 33% des patients âgés atteints de SA sévère et symptomatique. L’âge avancé et le dysfonctionnement du ventricule gauche étaient les caractéristiques les plus frappantes des patients à qui la chirurgie a été refusée, alors que la comorbidité a joué un rôle moins important.

Introduction

La sténose aortique (SA) est la valvulopathie cardiaque la plus fréquente dans les pays occidentaux, où sa prévalence augmente régulièrement avec l’âge1,2. Les indications du remplacement valvulaire aortique (RVA) sont bien définies dans les directives et il existe un consensus sur le fait qu’une intervention doit être conseillée chez les patients présentant une SA sévère et symptomatique.3. La décision d’opérer pose des problèmes spécifiques chez les personnes âgées, notamment en raison de l’augmentation de la mortalité et de la morbidité opératoires.4-17 Cependant, on sait peu de choses sur la proportion de patients âgés atteints de SA à qui l’on refuse l’intervention et, en particulier, sur les raisons qui conduisent à la contre-indiquer.17-19

Pour aborder cette question, nous avons utilisé les données de l’Euro Heart Survey sur les cardiopathies valvulaires, dont le but était d’évaluer les pratiques contemporaines en Europe. Une caractéristique importante de cette enquête prospective était d’inclure des patients consécutifs quelle que soit la décision thérapeutique. Cela a permis d’évaluer la proportion de patients souffrant de SA sévère et symptomatique qui n’ont pas été opérés et de comparer leurs caractéristiques et leur résultat à 1 an avec ceux chez qui une décision d’opérer a été prise.

Méthodes

Population étudiée

L’Euro Heart Survey on valvular heart disease a été menée entre avril et juillet 2001 dans 92 centres de 25 pays européens et a inclus 5001 patients. Les détails sur l’inclusion et la collecte des données ont été décrits précédemment.2 La SA isolée a été définie par une vélocité aortique maximale évaluée par échocardiographie Doppler ≥2,5 m/s sans valvulopathie associée significative, c’est-à-dire une régurgitation aortique ou mitrale supérieure au grade 2/4 ou une sténose mitrale avec une surface valvulaire ≤2 cm2.

La SA isolée a été rencontrée chez 1197 patients, parmi lesquels 408 étaient âgés de ≥75 ans. Parmi eux, 284 présentaient un SA sévère, défini par une surface valvulaire ≤0,6 cm2/m2 de surface corporelle et/ou un gradient aortique moyen ≥50 mmHg. Soixante-dix-huit patients avaient un gradient aortique moyen <50 mmHg et une surface valvulaire >0,6 cm2/m2 de surface corporelle. Ni le gradient moyen ni la surface de la valve aortique n’étaient disponibles chez 46 patients.

L’état fonctionnel manquait chez un patient, 26 étaient asymptomatiques, 41 étaient en classe II de la NYHA et n’avaient pas d’angine de poitrine, et 216 avaient des symptômes sévères, à savoir soit seuls, soit en combinaison : dyspnée NYHA classe III chez 105 patients (49%), classe IV chez 35 (16%) et angine de poitrine chez 147 (68%) (Figure 1).

Ces 216 patients âgés présentant une SA isolée sévère et des symptômes sévères constituent la base de la présente étude. Vingt-neuf (13%) ont été recrutés dans les services de consultations externes, 127 (59%) dans les services de cardiologie médicale et 60 (28%) dans les services de chirurgie cardiaque. Le suivi a débuté à partir de la date d’inclusion dans l’enquête. Un suivi à un an était disponible chez 190 des 216 patients (88%).

Analyse statistique

Les variables quantitatives ont été exprimées en moyenne±écart-type. Les caractéristiques des patients ont été comparées selon que la décision d’opérer a été prise ou non par le praticien traitant. Les facteurs prédictifs de la décision de ne pas opérer ont été analysés en comparant les caractéristiques des patients liées aux données démographiques, aux facteurs de risque, à la comorbidité, aux symptômes et aux examens, comme indiqué dans le tableau 1. Les définitions des facteurs de risque et des comorbidités sont détaillées dans l’annexe. Les comorbidités ont été analysées individuellement et combinées à l’aide de l’indice de comorbidité de Charlson.20 Comme l’objectif de l’Euroscore est d’évaluer le risque de la chirurgie, nous avons calculé l’Euroscore comme si tous les patients avaient subi une chirurgie valvulaire, ce qui permet d’évaluer le risque global de la chirurgie, quelle que soit la décision réelle.21 Les comparaisons univariables ont utilisé le test t de Student non apparié pour les variables quantitatives et le test χ2 pour les variables qualitatives.

Deux modèles multivariables ont été élaborés pour estimer les poids respectifs des caractéristiques cardiaques et non cardiaques dans la décision d’opérer. Dans le premier modèle, les comorbidités ont été combinées en utilisant l’indice de comorbidité de Charlson, le second modèle incluait des comorbidités distinctes listées dans le tableau 1.

Les variables avec P<0,25 ont été entrées dans chaque modèle logistique multivariable. Les variables quantitatives incluses dans les modèles multivariables ont été transformées en variables qualitatives dont les seuils ont été choisis en fonction de la progression du risque dans l’analyse univariable. Les variables ont été sélectionnées par une procédure à rebours avec un seuil de P=0,05, à l’exception de l’indice de comorbidité de Charlson qui a été forcé dans le modèle.

La survie à un an a été analysée par la méthode de Kaplan-Meier. L’analyse univariable des facteurs prédictifs de la mortalité à 1 an a utilisé un modèle de Cox. Les variables avec P<0,25 ont été entrées dans un modèle de Cox multivariable et sélectionnées par une procédure à rebours avec un seuil de P=0,05, à l’exception de la variable  » décision d’opérer  » qui a été forcée dans le modèle. L’hypothèse d’un risque proportionnel a été vérifiée graphiquement. Tous les tests étaient bilatéraux. Une valeur P <0,05 a été considérée comme significative. Les analyses ont été réalisées avec le logiciel statistique SAS (SAS Institute Inc. version 8.2).

Résultats

Caractéristiques des patients

Analyse de la décision thérapeutique

La chirurgie a été décidée contre par le praticien traitant chez 72 patients (33%). Une décision d’opérer a été prise chez 144 patients (67%) : 100 ont subi une AVR pendant la période d’étude dans un centre participant à l’Euro Heart Survey et 44 étaient programmés pour une intervention, 36 d’entre eux étant sur une liste d’attente d’une durée moyenne de 6,1±2,7 semaines (intervalle 3-12).

En analyse univariable, les patients chez qui l’intervention a été décidée contre par le praticien traitant étaient plus âgés, présentaient plus fréquemment un dysfonctionnement neurologique, une insuffisance cardiaque, une fibrillation auriculaire et un dysfonctionnement ventriculaire gauche (VG) que les patients chez qui la décision d’opérer a été prise (tableau 1). L’indice de comorbidité de Charlson était plus élevé chez les patients chez qui une intervention a été décidée (tableau 1). La décision d’opérer en fonction de l’âge, de la fraction d’éjection du ventricule gauche et de l’indice de comorbidité de Charlson est détaillée dans les figures 2 à 4. Il n’y avait pas de différence significative entre les quatre régions européennes concernant la proportion de décision d’opérer, qui était de 65 % en Europe du Nord, 57 % en Europe de l’Est, 73 % en Europe de l’Ouest et 63 % en Europe méditerranéenne (P=0,35). La chirurgie n’a pas été décidée chez sept patients (10 %) en raison du refus du patient.

Dans l’analyse multivariable, les deux facteurs significatifs liés à la décision de ne pas opérer étaient un âge plus avancé et une fraction d’éjection ventriculaire gauche plus faible, alors que l’indice de comorbidité de Charlson n’a pas atteint la signification statistique (tableau 2). En incluant les comorbidités individuelles au lieu de l’indice de comorbidité de Charlson dans l’analyse multivariable, les trois facteurs significatifs liés à la décision de ne pas opérer étaient l’âge avancé, la fraction d’éjection du ventricule gauche inférieure à 4800>50% et le dysfonctionnement neurologique (tableau 3).

Sur les 100 patients qui ont subi une AVR pendant la période d’étude dans un centre participant à l’Euro Heart Survey, cinq (5%) sont décédés pendant la période postopératoire (30 jours). L’Euroscore moyen était de 8,0±1,7 chez les patients ayant survécu contre 9,4±2,6 chez les patients décédés en postopératoire (P=0,076). Une bioprothèse a été utilisée chez 93 patients et une prothèse mécanique chez sept. Une procédure associée a été réalisée chez 41 patients, il s’agissait d’un pontage coronarien dans 37 cas et d’un remplacement partiel de l’aorte ascendante dans cinq cas (les deux procédures chez un patient). Il n’y a pas eu de cas de valvuloplastie aortique par ballonnet.

Résultat à un an

Parmi les 72 patients pour lesquels la décision initiale était de ne pas opérer, quatre ont subi une RVA ultérieure après 1 à 9 mois.

La survie à un an était plus élevée chez les 144 patients pour lesquels la décision d’opérer a été prise que chez les 72 autres (90,4±2,6 vs 84,8±4,8%, P=0,057). En analyse multivariable, la décision d’opérer n’était pas associée à la survie à 1 an (P=0,94) et les trois prédicteurs significatifs de la mortalité à 1 an étaient un indice de comorbidité de Charlson plus élevé, le sexe masculin et la classe fonctionnelle IV de la NYHA (tableau 4).

Discussion

Cette enquête contemporaine paneuropéenne est la première étude prospective, qui a été spécifiquement conçue pour évaluer la prise en charge des patients atteints de cardiopathie valvulaire dans un large éventail de centres. Un tiers des patients âgés souffrant de SA sévère et symptomatique se sont vus refuser une intervention chirurgicale par le praticien traitant. Les patients chez qui une intervention a été décidée étaient plus âgés et présentaient plus fréquemment une fraction d’éjection du ventricule gauche <50% et des comorbidités. Cependant, les résultats de l’analyse multivariable suggèrent que l’âge et la fonction ventriculaire gauche ont un poids plus important dans la décision d’opérer que la combinaison des comorbidités. En considérant les comorbidités individuellement, le dysfonctionnement neurologique était le seul associé à la décision de ne pas opérer.

Population

La présence de centres de soins primaires et l’inclusion de patients provenant de cliniques externes, ainsi que de services médicaux et chirurgicaux, ont permis de considérer un large spectre de patients âgés atteints de SA et de réduire les biais de sélection. Nous avons délibérément choisi de ne considérer que les patients souffrant d’une SA sévère associée à des symptômes graves, c’est-à-dire les patients pour lesquels il existe une indication claire et nette de chirurgie selon les directives.3 Les facteurs de risque cardiovasculaire et les comorbidités étaient fréquemment associés. Les patients étaient pris en charge à un stade relativement avancé de leur maladie, comme l’attestent les 24% présentant une insuffisance cardiaque congestive et le recours fréquent à un traitement médical.

Décision contre la chirurgie : fréquence et caractéristiques associées des patients

La prise de décision est particulièrement complexe chez les personnes âgées qui représentent une population hétérogène, ce qui entraîne une large gamme de risques opératoires, ainsi qu’une espérance de vie, selon les caractéristiques individuelles cardiaques et non cardiaques des patients.

Dans l’Euro Heart Survey, malgré une SA sévère et des symptômes graves, l’intervention a été refusée chez pas moins de 33% des patients. Dans la seule autre série abordant cette question, le chiffre correspondant était de 41% chez les patients âgés de >70 ans présentant un SA et des symptômes graves.17 Outre les caractéristiques des patients, la proportion de patients pour lesquels la décision de ne pas opérer est prise est également influencée par les modèles de référence et on pourrait s’attendre à ce qu’elle soit plus élevée en médecine générale.

Pour analyser la prise de décision, nous avons choisi de comparer les caractéristiques objectives des patients plutôt que les raisons données par le praticien traitant afin de limiter la composante subjective dans l’évaluation du patient. Les deux caractéristiques les plus frappantes des patients qui se sont vu refuser une intervention chirurgicale étaient l’âge avancé et le dysfonctionnement du ventricule gauche. L’âge et le dysfonctionnement du ventricule gauche sont associés à un risque opératoire accru et à un résultat tardif médiocre après la chirurgie, ce qui peut expliquer la réticence à opérer ces patients. Cependant, la prise de décision devrait reposer non seulement sur l’estimation du risque opératoire, mais aussi sur l’estimation du rapport risque-bénéfice, ce qui nécessite de comparer le résultat après chirurgie avec l’évolution spontanée.

L’âge est un facteur prédictif important du risque opératoire et d’une mauvaise survie tardive en chirurgie cardiovasculaire, en particulier dans le cas de la SA.15,21-25 Néanmoins, l’âge n’est pas un facteur prédictif d’une mauvaise issue tardive si l’on considère la survie relative, c’est-à-dire comparée à la survie attendue dans une population appariée selon l’âge.4,12,26 Ces résultats ont conduit les directives à déclarer que l’âge en soi n’est pas une contre-indication au remplacement valvulaire et que la décision dépend de nombreux facteurs.3

La diminution de la fraction d’éjection du ventricule gauche est un facteur prédictif de la mortalité opératoire en chirurgie cardiovasculaire et dans certaines séries étudiant des personnes âgées atteintes de SA.6,9,15,21 Cependant, l’augmentation du risque opératoire est plus marquée chez les patients qui présentent une dysfonction ventriculaire sévère, comme une fraction d’éjection du ventricule gauche <30%, ce qui a été rarement rencontré dans la présente étude. Inversement, des études sur l’histoire naturelle ont souligné que l’insuffisance cardiaque congestive et le dysfonctionnement du ventricule gauche sont des facteurs prédictifs importants de mauvais résultats chez les patients non opérés atteints de SA,17,27,29 et les patients présentant un dysfonctionnement du ventricule gauche semblent tirer un bénéfice particulier de la chirurgie.17,19 Par conséquent, dans la présente étude, la diminution de la proportion de décisions d’opérer les patients dont la fraction d’éjection du ventricule gauche se situe entre 30 et 50 % n’est ni corroborée par l’analyse du rapport risque-bénéfice ni soutenue par les directives.3

Bien sûr, selon le jugement clinique, la chirurgie est plus susceptible d’être refusée chez les patients très âgés ou ceux qui présentent une dysfonction majeure du ventricule gauche. Cependant, il y avait très peu de patients âgés de >90 ou avec une fraction d’éjection du VG <30% dans la présente série.

Les comorbidités sont fréquentes chez les personnes âgées et devraient affecter l’analyse risque-bénéfice car elles influencent l’espérance de vie indépendamment de la maladie valvulaire, ainsi que le risque opératoire et le résultat tardif après une AVR. La combinaison de comorbidités est également un déterminant important du risque opératoire.21,23,24

Comme prévu, la proportion de patients chez qui une décision d’opérer a été prise a diminué pour des niveaux plus élevés de l’indice de comorbidité de Charlson. Cependant, il n’était plus significativement associé à la décision thérapeutique en analyse multivariable, ce qui suggère que l’âge et la fonction VG étaient des déterminants plus forts du choix que les comorbidités. Considérée individuellement, la seule comorbidité associée à la décision de ne pas opérer était le dysfonctionnement neurologique. L’insuffisance rénale ou la bronchopneumopathie chronique obstructive est un facteur prédictif de l’espérance de vie ainsi que de la mortalité opératoire, en particulier dans la SA chez les personnes âgées, mais elles n’étaient pas associées à la décision de ne pas opérer dans la présente série.9,10,14

La maladie coronaire est une comorbidité particulière. Elle augmente le risque opératoire, mais son poids dans la décision d’opérer ne peut être objectivement évalué car la réalisation d’une coronarographie est étroitement liée à la décision d’opérer.4,5,8,13 Ceci conduit à un biais évident dans l’évaluation de la prévalence de la maladie coronaire chez les patients non opérés.

Nos résultats issus de la pratique observée sont cohérents avec une analyse utilisant une approche différente basée sur des vignettes de cas décrivant différents profils de patients.18 L’âge et la fonction VG étaient les facteurs les plus importants de la décision d’opérer ou non les patients âgés atteints de SA pour la majorité des cardiologues interrogés, alors que la comorbidité jouait un rôle moins important.

Les scores multivariables estimant la mortalité opératoire peuvent être utiles à la prise de décision dans cette population hétérogène particulière. Cependant, ces scores présentent des limites lorsqu’on tente d’analyser les décisions thérapeutiques. L’Euroscore inclut des variables liées au moment et aux modalités de la chirurgie, et la comparaison de l’Euroscore entre les patients opérés et non opérés, c’est-à-dire la comparaison du risque estimé de la chirurgie, doit tenir compte du fait que tous les patients auraient subi une chirurgie valvulaire. La force de l’indice de comorbidité de Charlson est qu’il s’agit d’une évaluation globale et validée de l’impact des comorbidités, qui sont fréquemment associées chez les personnes âgées. Aucun système de scoring ne permet de pondérer le résultat spontané par rapport au résultat de la chirurgie. Enfin, la valeur prédictive des scores peut être plus faible dans des cas spécifiques, tels que les patients opérés pour une SA ou les personnes âgées.25 Cela explique pourquoi les directives stipulent qu’il n’existe pas de méthode fiable pour identifier les patients âgés qui tireront le plus grand bénéfice d’une RVA, et que le jugement clinique reste le principal déterminant de la décision thérapeutique chez chaque patient.3 Le refus du patient a rarement été mentionné comme une raison de décider de ne pas pratiquer une RVA. Bien que la préférence du patient contribue à la décision thérapeutique, elle est susceptible d’être influencée par le praticien responsable.

Résultat pour le patient

Dans cette étude incluant un grand nombre de centres, la mortalité opératoire était relativement faible (5%) compte tenu du profil de risque du patient, comme cela a été rapporté dans certaines séries.10,11,17 La survie à un an se situait dans la fourchette haute des résultats rapportés chez les patients âgés non opérés atteints de SA.17,19,28,29 Ceci peut être en partie lié à l’inclusion de patients provenant de cliniques externes, car les séries comprenant uniquement des patients hospitalisés sont plus susceptibles de sélectionner des patients présentant des maladies plus avancées.

Dans l’analyse multivariable, la décision d’opérer n’était plus liée au résultat, et les facteurs prédictifs étaient cohérents avec les séries chirurgicales.9,10,14,22 Ceci est une illustration des facteurs de confusion entre la décision d’opérer et les caractéristiques du patient, car les patients non opérés ont un plus mauvais profil clinique. Cela contribue à un plus mauvais résultat, comme l’atteste la forte valeur prédictive de l’indice de comorbidité de Charlson. De plus, le suivi à 1 an est probablement trop court pour percevoir le bénéfice de la RVA, car la survie à 1 an est en partie déterminée par la mortalité opératoire, et la plupart des différences entre les traitements chirurgicaux et médicaux dans la SA apparaissent après la première année.17,19

Limites de l’étude

Une telle enquête observationnelle ne permet pas d’évaluer pleinement la pertinence de la décision thérapeutique pour un patient individuel. Néanmoins, cette enquête permet pour la première fois d’analyser prospectivement la décision de chirurgie et de la mettre en perspective avec les caractéristiques cardiaques et non cardiaques des patients dans une population de patients âgés présentant une SA sévère et symptomatique.

En raison du nombre de patients dans chaque centre participant, il n’a pas été possible d’ajuster l’analyse de la décision thérapeutique ou du résultat sur chaque centre. Cependant, il n’y avait pas de différence significative en comparant les régions européennes.

L’absence de validation externe limite la précision des facteurs liés à la décision de ne pas opérer. Cependant, le but de la présente étude n’est pas d’élaborer un modèle à utiliser dans la pratique clinique, mais d’analyser la prise de décision.

Conclusion

Dans cette enquête prospective incluant un large éventail de patients, une intervention a été décidée pour pas moins d’un tiers des personnes âgées présentant une SA sévère et symptomatique. L’analyse des caractéristiques des patients liées à la décision thérapeutique suggère que le poids des variables cardiaques est surestimé par rapport aux comorbidités dans le refus de la chirurgie.

Ces résultats soulignent les difficultés particulières concernant la prise de décision chez les personnes âgées, chez qui les directives actuelles fournissent des recommandations limitées en raison du faible niveau de preuve de la littérature. Il est peu probable que des essais randomisés soient menés dans ce domaine, ainsi d’autres études prospectives incluant la quantification des comorbidités sont nécessaires pour permettre de mieux évaluer le rapport risque-bénéfice et, par conséquent, d’affiner les directives.

Reconnaissances

L’enquête Euro Heart sur la cardiopathie valvulaire a été financée par : la Société européenne de cardiologie, la Dutch Heart Foundation, la Fédération Française de Cardiologie/Société Française de Cardiologie, la Hellenic Cardiological Society, la Swedish Heart, and Lung Foundation, la subvention de la Commission européenne (projet Infermed/Mansev), Toray Medical Company.

Conflit d’intérêt : aucun déclaré.

Annexe : définitions

Tabagisme : cigarette, cigare, pipe.

Hypertension : diagnostic préalablement posé par le médecin, prise de médicaments pour faire baisser la tension artérielle ou valeurs tensionnelles connues de ≥140 mmHg systolique ou ≥90 mmHg diastolique à plus de deux reprises.

Diabète : glycémie à jeun ≥7 mM/L sur plus de deux prélèvements ou diagnostic préalable de diabète, quel que soit le traitement.

Ancienneté familiale de maladie coronarienne prématurée : antécédents d’angine de poitrine, d’infarctus du myocarde ou de mort subite chez des parents du premier degré avant l’âge de 55 ans.

Maladie pulmonaire obstructive chronique : diagnostic préalablement posé par le médecin, ou patient recevant des bronchodilatateurs, ou valeurs du volume expiratoire forcé <75% de la valeur attendue, de la pO2 artérielle <60 mmHg, ou de la pCO2 artérielle >50 mmHg dans des études antérieures.

Atherosclérose carotidienne : sténose >50%, chirurgie antérieure ou prévue.

Atherosclérose des membres inférieurs : claudication, chirurgie antérieure ou prévue.

Dysfonctionnement neurologique : maladie neurologique affectant gravement la déambulation ou le fonctionnement quotidien.

Maladie coronarienne : plus d’une sténose >50% du diamètre du vaisseau à la coronarographie.

Insuffisance cardiaque congestive : signe clinique d’insuffisance cardiaque congestive à l’admission.

Figure 1 Détails de la population étudiée.

Figure 1 Détails de la population étudiée.

Figure 2 Décision d’opérer selon la tranche d’âge.

Figure 2 Décision d’opérer selon la tranche d’âge.

Figure 3 Décision d’opérer selon la fraction d’éjection ventriculaire gauche.

Figure 3 Décision d’opérer en fonction de la fraction d’éjection ventriculaire gauche.

Figure 4 Décision d’opérer en fonction des comorbidités.

Figure 4 Décision d’opérer en fonction des comorbidités.

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